Dans les médias – Statut autoproclamé des pharmacies dites « de spécialité » : donnons l’heure juste aux patients pour qu’ils puissent faire un choix éclairé 

Les pharmaciens dans les médias

Des membres de l’AQPP prennent position pour défendre l’habilité de tous les pharmaciens communautaires au Québec à servir les médicaments de spécialité et dénonce les pratiques fautives mises en place par une poignée de confrères – et certains joueurs de l’industrie pharmaceutique et leurs sous-traitants, les programmes de soutien aux patients (PSP) – pour accaparer des parts de marché en faisant fi du libre choix des patients. Avec le consentement des signataires, nous partageons ici la lettre, également publiée dans Profession Santé en réponse à l’entrevue avec la présidente du Regroupement des pharmacies de médicaments de spécialité du Québec.


Réaction à l’entrevue de Profession Santé avec le Regroupement des pharmacies de médicaments de spécialité publiée le 18 juillet 2024

Signataires :

  • Shawn Barber-Lanthier, pharmacien propriétaire en Outaouais 
  • Aleck Brodeur, pharmacien propriétaire à Montréal 
  • Eliott Cantin, pharmacien propriétaire dans Chaudière-Appalaches 
  • Philippe Desmarais, pharmacien propriétaire en Montérégie 
  • Dominic Dorion, pharmacien propriétaire en Gaspésie 
  • Andrée Gélinas, pharmacienne propriétaire en Mauricie
  • Marc-André Lapierre, pharmacien propriétaire aux Îles-de-la-Madeleine 
  • Charline Prévost, pharmacienne propriétaire en Abitibi-Témiscamingue
  • Francis Prud’homme, pharmacien propriétaire en Montérégie-Ouest 
  • Joanie Richard, pharmacienne propriétaire en Montérégie-Est 
  • Jean-François Rochette, pharmacien propriétaire en Outaouais 
  • Meyranie St-Pierre, pharmacienne propriétaire au Bas-Saint-Laurent 
  • Michaël Tourigny, pharmacien propriétaire en Mauricie

Statut autoproclamé des pharmacies dites « de spécialité » : donnons l’heure juste aux patients pour qu’ils puissent faire un choix éclairé 

En tant que pharmaciennes et pharmaciens propriétaires, nous sommes témoins depuis des années de pratiques fautives mises en place par une poignée de confrères – et certains joueurs de l’industrie pharmaceutique et leurs sous-traitants, les programmes de soutien aux patients (PSP) – pour accaparer des parts de marché en faisant fi du libre choix des patients. Le système mis en place détourne nos patients à notre insu pour certains médicaments dispendieux et nous empêche de leur servir l’entièreté de leur médication et d‘assurer une prise en charge globale de leur(s) traitement(s). Plusieurs patients qui souhaitent rapatrier leur dossier dans leur pharmacie habituelle se butent à une série de barrières dissuasives mises en place par ce groupe d’individus et les tiers avec qui ils collaborent, dont certains PSP. À cela s’ajoutent les entraves que nous devons souvent surmonter pour obtenir un accès aux médicaments en question.

En tant que membres de l’OPQ, nous sommes habilités à servir tous les médicaments approuvés par Santé Canada. Nous sommes tous en mesure d’offrir des conseils personnalisés aux patients atteints de maladies chroniques ou rares, notamment pour l’administration de leur médication qui requiert parfois des manipulations délicates ainsi qu’un suivi rigoureux en tout temps. S’autoproclamer « pharmaciens de spécialité », un titre qui n’est pas reconnu, ou insinuer posséder une expertise que les autres pharmaciens inscrits au tableau de l’OPQ n’ont pas, est complètement inapproprié. D’ailleurs, les réflexions entourant la spécialisation en pharmacie, qui sont d’ailleurs toujours en cours, n’ont rien à voir avec la distribution et le service des médicaments de spécialité, mais sont plutôt en lien avec la maîtrise en pharmacothérapie avancée que détiennent majoritairement les pharmaciens œuvrant en établissement de santé.

S’il est vrai que certaines pharmacies peuvent choisir, pour des raisons opérationnelles ou de main-d’œuvre, de déléguer certaines tâches à des confrères ou consœurs, il revient au pharmacien et à son patient de déterminer la meilleure approche à prendre pour assurer un traitement optimal. Cela fait partie de notre responsabilité professionnelle. Toutefois, laisser entendre aux patients qu’ils ne seront pas aussi bien servis par leur pharmacie communautaire est une insulte à notre profession.     

Nous sommes des professionnels de la santé compétents ayant à cœur le bien-être des patients dans nos communautés et prenons tout le temps nécessaire, avec l’aide de nos équipes, pour les servir et répondre à leurs questions. Nous nous formons de façon continue pour offrir les meilleurs services possibles et avons l’avantage de connaître nos patients et leur situation de santé dans leur intégralité. Et puisque la santé globale des patients est notre priorité, nous sommes présents pour eux peu importe leurs besoins en pharmacie et non pas en fonction d’un seul médicament : vaccination, prise en charge de conditions chroniques, prescriptions pour certaines conditions, et plus encore.

Cinq pharmaciens propriétaires ont récemment décidé de se regrouper pour donner une apparence légitime à leur système opaque, alors que la quasi-totalité des administrateurs de ce regroupement ont été sanctionnés par l’Ordre pour des infractions déontologiques, notamment liées à de l’acquisition de clientèle par le biais d’ententes avec des tiers, dont des programmes de soutien aux patients.

Comment ce regroupement ose-t-il prétendre que les intérêts économiques et commerciaux sont au cœur des démarches entamées par notre association (AQPP) alors que ce sont leurs membres qui opèrent des entreprises en marge de la loi et qui ont choisi de servir uniquement les patients qui peuvent leur rapporter gros? Certes, l’AQPP a déposé une demande d’action collective, une démarche qui a pour objectif de démontrer les impacts financiers qui découlent de la concentration de ce marché. En effet, en usant de stratégies misant sur la crainte et la vulnérabilité des patients pour obtenir leur consentement, ces pharmacies accaparent des parts de marché au détriment de l’ensemble des 1900 pharmacies qui composent notre réseau. Ces revenus nous auraient permis de renforcer nos services de première ligne, dans toutes les régions du Québec.

Les médicaments de spécialité représentent un pan important de l’avenir de la pharmacie. Les percées en recherche et développement ne laissent aucun doute que de plus en plus de patients en bénéficieront. Il est donc utopique de croire que six pharmacies au Québec pourront desservir l’ensemble des patients. Ce que nous voulons préserver, ce n’est pas un modèle de pharmacie traditionnelle, mais bien la pérennité de notre réseau accessible et de proximité qui est présent pour les patients partout au Québec, peu importe leur condition de santé et leurs besoins en pharmacie.

Nous voulons une chance égale d’accéder à ces produits pour les patients qui souhaitent être servis dans nos pharmacies, de développer nos services et d’innover dans l’intérêt ultime des services à la population. Nous voulons que les patients puissent faire un véritable choix éclairé.

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